Mercredi matin. Je roule sur l'autoroute depuis quelques minutes, songeur. Je n'ai plus de lave-glace et il ne pleut pas assez pour que les essuie-glaces nettoient le calcium qui s'accumule lentement sur mon pare-brise. Il fait inhabituellement chaud pour un 15 février.
Je suis en route vers mon premier rendez-vous face à face avec un éditeur. Mes recherches ont révélées que mon roman allait à merveille avec leur catalogue. Ils ont déjà publié une biographie sur les Beatles, une sur Elvis ainsi qu'une série de romans historique sur les Reines d'Angleterre.
Mais leur bureau est loin. Quelque part sur la Rive-Sud. Mon GPS me pointe inlassablement la bonne direction. Je vois de moins en moins bien la route. Ma tête est pleine d'arguments pour mettre en valeur mon œuvre.
Je suis 20 minutes en avance. C'était moins loin que je pensais, finalement. Je m'arrête à une station service, achète du lave-glace. Je me dis que c'est stupide, que je vais probablement me salir à ouvrir le capot de ma Smart et que je vais avoir l'air d'un con devant l'éditeur.
Mais non, je m'en fais encore pour rien. À 10h pile il me reçoit dans mon bureau en lançant:
"Comme ça, vous êtes un fan des Beatles?"
Je ris. Le premier contact est agréable. Le type est sympathique, la conversation plaisante. Il entre rapidement dans le vif du sujet: le bilinguisme. Pour lui, c'est un problème. Je m'en doutais, évidement. Il m'affirme tout de go que s'il avait entre les mains une version française, il m'offrirait un contrat sur le champ.
Nous parlons un peu du contrat. Standard pour un premier roman, paraît-il. 10% sur les ventes de chaque livre. 50% de la vente des droits (TV ou traductions)
Ce qui soulève un autre point: L'éditeur se donne le droit de changer le titre et de choisir la couverture qu'il désire. J'ai un droit de regard mais pas de véto, point final. Il m'explique que c'est parce qu'il désire que le roman soit accessible à un grand public. Que monsieur et madame tout le monde puisse se le procurer à la pharmacie et chez Zellers et donc le titre et la couverture doivent répondre à un certain standard pour ce genre de marketing. Il est important que le roman se démarque des biographies du groupe.
Je lui montre la couverture que j’avais faite "pour le fun". Il prend mon iPad et sourit:
"Elle est bien. J'avais peur qu'elle soit laide!"
Certains auteurs écrivent bien, mais n'ont aucun goût artistique, paraît-il! Il commente sur le fait qu'ils avaient tenté d'imiter la police d'écriture "Beatles" pour la biographie qu'il avait déjà publié. Il me la montre. La conversation diverge ensuite vers les eBooks. Son distributeur s'en charge. C'est 10% aussi, mais d'un montant moindre, puisque les eBooks coûtent moins cher.. Je lui parle de la jeune Britannique qui a fait plus de 400 000$ en un an en vendant ses romans sur Amazon à 3$ chaque...
La conversation se poursuit. Je suis à l'aise, je glisse quelques anecdotes Beatles ici et là. Il semble apprécier. Mais le temps passe et il met fin à la rencontre en me donnant 10 jours pour prendre une décision. Si je choisi de traduire mon roman, il est prêt à passer à la prochaine étape.
Je retourne à ma Smart digérer tout ça.
Il est clair que je dois relancer l'autre éditeur qui ne m'a toujours pas rappelé. Et il est clair que je dois traduire moi-même mes dialogues anglais... J'ai du pain sur la planche.